Auteur
Géraldine Barron et Noëlle Gouillart

 Type de document
Intervention à la journée d'études de Poldoc, le 17 mai 2001

 Date
2001

 

Désherbage des magasins et  conservation partagée :

Présentation des travaux de l’équipe de projet

Géraldine Barron et Noëlle Gouillart

Intervention à la journée d’étude Poldoc du 17 mai 2001 à Lyon

 

Présentation du groupe

   Ce groupe est le dernier né des équipes Poldoc, il a tenu 2 réunions, et compte 8 membres 5 établissements sont représentés
  -         Bibliothèque  de la FNSP
  -         2 BU : Lyon 2 et SCD Franche-Comté
  -         2 BM : Nantes et Chambéry
  A titre d’expert ou d’observateur font également partie du groupe  C. Lieber et H . Villard

 

  Pourquoi le désherbage des magasins ? pourquoi la conservation partagée

   Deux questions initiales lancent la problématique:
  -         Problème de place évident - saturation des magasins, mais surtout une question de politique documentaire : mieux conserver, savoir ce que l’on conserve et pourquoi.
  -         Que faire ensuite des documents désherbés ?
   La notion de conservation partagée entre les établissements s’impose dans tout débat sur le désherbage. C’est sans doute la seule solution pour éviter que tout le monde conserve la même chose et, surtout, jette la même chose. C’est donc une notion consensuelle, tout le problème étant … de la mettre en pratique.

   On peut dire que la question de la conservation partagée se pose avec une particulière acuité dans le cadre qui nous occupe, car les documents en magasin ont fait l’objet, à un moment donné, d’un choix implicite de conservation : il importe donc d’autant plus de leur donner une destination finale raisonnée.

 

    Le désherbage des magasins

     1. Les fonds envisagés
   On ne parle pas des fonds anciens (1811, 1850, 1900…) et précieux, ni de tous les fonds pour lesquels un établissement a reçu une vocation particulière de conservation - ou se la reconnaît sans ambiguïté (ex : fonds régionaux des BM)
   Globalement, on parle de fonds du XXème siècle, en gros 1900 à 1975 - 1980.

     2.  Ambiguïté dans la définition d’une politique de conservation
   En premier lieu, nous nous sommes rendus compte qu’on se heurtait toujours à une ambiguïté fondamentale au moment de définir des critères d’élimination/conservation pour des fonds en magasin.

   Comme chacun sait, la politique documentaire comprend un volet acquisition et un volet élimination/conservation. Les deux aspects sont étroitement solidaires et l’on commence généralement par réfléchir à l’aspect acquisition, parce que notre première mission est de répondre à la demande du public d’aujourd’hui. La question de la conservation ne se pose de manière brûlante que par la suite, au moment de désherber les collections en libre-accès.
   Il nous semble donc que pour désherber un fonds en magasin, dans un établissement où cela ne s’est encore jamais pratiqué, on se trouve devant l’alternative suivante
      o       soit désherber un fonds, par exemple des années 1950, sur des critères issus d’une           politique d’acquisition valide en 2001
      o       soit traiter ce fonds comme un entité close et distincte des collections plus récentes et           déterminer des critères d’élimination et de conservation propres à ce fonds. Dans un           deuxième temps seulement, on tentera d’intégrer les conclusions de cette démarche           pragmatique dans la politique documentaire générale de l’établissement.

     Concernant la première hypothèse, où l’on désherbe  les magasins sur des critères directement issus du libre-accès, il est clair qu’elle s’adaptera d’autant mieux qu’un établissement sera spécialisé et aura une politique documentaire nette et stabilisée depuis longtemps.
   Mais comment procéder dans une bibliothèque encyclopédique qui a accumulé des fonds en magasin sans réelle ligne directrice pendant des années, en particulier en acceptant des dons, et où l’on trouve très peu de doubles ? Difficile, dans ce cas, d’utiliser les grilles mises en place pour les collections vivantes. Il faut donc partir du fonds lui-même, des lignes de force que l’on pourra discerner. Dès lors, la question est : peut-on trouver a posteriori une identité à un fonds ? C’est une question à laquelle on se heurte souvent.

   Et puis dans quel cadre allons-nous déterminer cette identité ?
     o       Va t-on rester dans celui de la bibliothèque ? Est-ce que c’est intéressant, par              exemple, de rendre lisible une histoire des collections ?
     o       Va t-on se situer par rapport aux bibliothèques de la région ? dans un cadre de            conservation partagée ? Il y a des expériences réussies. Sont-elles transposables            partout ?
     o       Il y a de toutes façons aussi une préoccupation d’ordre national dans le désherbage,            sur le plan de la mémoire collective. Si l’on a pu dire que le désherbage se situait            dans un registre émotionnel, c’est bien parce que l’on craint d’être le dernier à se            séparer d’un document, et d’entraîner par là une perte irréparable,


      3.  Définir une typologie des magasins   

   Nous réfléchissons aussi à une sorte de typologie des fonds en magasin Dans le cadre d’une politique documentaire établie, on peut établir un parcours type du document, du libre-accès à la conservation définitive. Par exemple, les livres retirés des salles peuvent aller dans une réserve active pendant 10 ou 20 ans, rester ou non empruntables, passer dans un magasin semi-patrimonial, et éventuellement, lorqu’ils ont une centaine d’années, dans un magasin de conservation définitive. Cela suppose bien sûr de définir des critères de tri à chaque étape.Cela dépend beaucoup des établissements. 

   C’est pourquoi nous nous intéressons en particulier à la notion de réserve vive ou réserve d’usage, qui nous paraît distincte de la notion de magasin semi-patrimonial. En effet, la réserve vive contient des documents relativement récents, qui complètent directement les collections en libre-accès. A priori, les documents ne doivent pas avoir plus d’une trentaine d’années Elle.intéresse le même public que le libre-accès, même si son usage est résiduel. En revanche, le magasin semi-patrimonial ouvre la voie vers la conservation définitive. Il contient des documents plus anciens. On le constitue en pensant aux recherches qu’il faut permettre à futur public.

   Cette distinction permet également de poser la question des responsabilités de chacun en matière de conservation. En dehors de fonds spécialisés, dans quelle mesure un bibliothèque a-elle vocation à faire passer systématiquement une partie de ses collections dans un fonds semi-patrimonial, puis patrimonial ? Beaucoup de bibliothèques de taille moyenne, par ex. Chambéry, ont accumulé des fonds de livres qui ont entre 30 et 100 ans. Il est évident qu’elles ne peuvent pas se séparer aveuglément de ces livres. Mais faut-il en accumuler d’autres ?

   Travailler pour le public futur est une tâche coûteuse et aléatoire pour une bibliothèque encyclopédique moyenne. Il en va tout autrement, évidemment , si elle œuvre dans le cadre d’un programme de conservation partagée avec d’autres établissements

 

  La conservation partagée

   Notre deuxième grand axe de travail. Après la question des objectifs et des critères, c’est l’autre grande question posée par le désherbage : que faire des documents exclus ?

        1.  Les  silos à livres
  
La solution du silo à livres paraît idéale et l’on se dit que toute bibliothèque devrait pouvoir s’adresser à une bibliothèque de dépôt pour se débarrasser des ouvrages désherbés. Les expériences de la bibliothèque cantonale et universitaire de Lausanne et celle du Centre technique du livre de l’enseignement supérieur sont des réussites. Il n’y a malheureusement pas de projet en cours au niveau ministériel et le désherbage n’est pas un thème vraiment porteur pour motiver les élus... Nous ne désespérons pas, toutefois, de susciter un projet au niveau régional

      2.  la conservation partagée entre les établissements (« les centres de gravité» d’H.Villard)
   Une autre piste consiste, bien sûr, à répartir les charges de conservation entre les établissements.

            2.1.  Quelles responsabilités pour quels établissements ?

D’emblée se pose alors la question de la qualification des établissements. On a dit que toute bibliothèque pouvait, dans la mesure de ses moyens, participer à un programme collectif de conservation. Mais n’y a t-il pas un rôle particulier à jouer de la part des BMVR, pôles associés de la BNF, bibliothèques en charge du dépôt légal d’imprimeur, CADIST… ? Les responsabilités sont beaucoup mieux définies en matière d’acquisition qu’en matière de conservation.

Est-ce que, par exemple, ces établissements, qui ont des domaines d’acquisition spécialisés,  peuvent accueillir des dons d’autres bibliothèques dans ces domaines ?

Cette définition des responsabilités de conservation est une des préoccupations importantes de notre groupe de travail

2.2.  Sur quelles bases faire la répartition.

Nous nous demandons également sur quelle bases la conservation peut être répartie entre établissements

Géographiquement, des actions sont déjà menées avec succès au niveau régional, qui paraît une bonne base de départ

Sur le plan des domaines à conserver, il est logique de partir des points forts des uns et des autres, même si cette méthode suscite quelques interrogations :

§        définir les missions de conservation en fonction des points forts des établissements permet-il, en fin de compte, une couverture exhaustive des domaines à conserver ? (peut-être pas le problème aujourd’hui)

§        surtout, toute bibliothèque a t-elle des lignes de force suffisamment significatives pour s’intégrer dans un cadre collectif ? Considérant, là encore, les bibliothèques non spécialisées, on se rend compte en discutant entre collègues que ce n’est pas toujours évident (entre des sujets très vaste, type la montagne, ou de anecdotiques-les courses de vélo)

 

C’est pourquoi, en contrepoint et plutôt dans le but d’alimenter la réflexion théorique, nous nous intéressons aussi à des approches radicalement différentes, comme les« joint fiction reserves », JFT., qui sont des programmes de conservation partagée des romans par ordre alphabétique. Ce système a fonctionné en Angleterre dans les années 1970 et il semble que des programmes sont encore en cours en Angleterre, en Irlande et aux Etats-Unis

 

    Les travaux de l'équipe

  -         Bibliographie réalisée par H.Villard

   Hubert Villard a réalisé pour le groupe une sélection de sites français et étrangers (anglo-saxons) sur le désherbage, donnant un aperçu des préoccupations et méthodes de différents établissements : bibliothèques nationales, universitaires, publiques, d’instituts. Ces liens ont été intégrés dans les Ressources sur le site Poldoc.

-         Projet d’enquête pour une carte documentaire de la France

   Lorsqu’une bibliothèque a défini sa politique de conservation et entame le désherbage de ses magasins pour en faire un fonds construit et cohérent, les choix d’élimination peuvent paraître assez simples. Or nous nous heurterons toujours à un réflexe conservateur –et dans certains cas salvateur- en nous interrogeant sur le devenir de l’ouvrage éliminé : faut-il le pilonner sans autre forme de procès puisqu’il ne correspond pas aux choix de conservation de l’établissement, ou faut-il s’assurer qu’un exemplaire est conservé dans une autre bibliothèque, et que cette bibliothèque a pour mission de le conserver ?

   L’importance de cette question nous a conduits à vouloir réaliser une carte documentaire de la France, afin d’identifier les lieux de conservation spécialisés, ce qui facilite d’une part la vérification de l’existence ou non de tel titre dans un lieu de conservation, et d’autre part la réorientation éventuelle de la perle rare vers l’établissement de conservation adéquat.

   Cette carte documentaire devrait donc bien entendu porter un certain nombre de renseignements susceptibles d’aider le désherbeur : thèmes conservés, durée de conservation, conditions d’acceptation et de traitement des dons, conditions de prêt entre bibliothèques, etc.

   Cette carte ne peut être élaborée qu’à partir d’une enquête, et sa complétude repose donc sur la bonne volonté des établissements qui devront répondre rapidement et s’engager sur un certain nombre de points. Elle peut sembler faire double emploi avec une entreprise de grande envergure telle que le RNBCD du CCFr, mais il s’agit de réaliser rapidement un outil de travail simple et succinct avant que ne soit achevé le RNBCD.

   Le groupe Poldoc et l’enssib se proposent de réaliser l’enquête et la carte qui doit en résulter, et des contacts seront pris avec le CCFr.

-         Cahiers des charges pour des stagiaires enssib à Nantes et à Chambéry

   Les BM de Nantes et de Chambéry se proposent de recevoir un stagiaire de DCB pour travailler sur les projets de désherbage des magasins. L’objectif pour le stagiaire serait de définir avec l’équipe de la BM des éléments de méthode pour le désherbage des magasins, et de réfléchir à la notion de représentativité du fonds (par rapport à la collection ou par rapport à l’édition) et la détermination de lignes de forces de la collection.

---------------------------

 

  13 07 2001